Les bd de tonton olivier

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Ce billet s'adresse aux parents qui disent à leurs enfants « prends des livres...  et pas que des bd, hein ! ».

 
L'intention est bonne, personne n'en doutera. Mais si l'on tente une maigre analyse de cette phrase ô combien commune dans les bibliothèques, on remarquera que la bande dessinée y est fortement dépréciée, voire opposée au genre littéraire que constitue un Livre, un Vrai. Dans une variante proche, il existe aussi le « Je suis un peu désespéré(e), mon fils / ma fille ne lit que des mangas. Vous ne pourriez pas lui conseiller autre chose ? ». Le lecteur attentif en arrivera aux mêmes conclusions que précédemment. Le « que » = dépréciation du manga / Le « autre chose » = un Livre, un Vrai.

Plutôt que de blâmer inutilement les auteurs de ces phrases (qui suis-je après tout, non mais oh !), je vais user d'une ruse perverse : jouer le rôle du jeune tonton –qui lit encore des bd- et conseiller aux parents des bd et des mangas qui pourraient les intéresser et qui seraient même, sait-on jamais, susceptibles de faire évoluer quelque peu leur avis sur la question.

On commence par la bd franco-belge ou américaine ou ce que vous voulez exceptée la bd japonaise... ou chinoise, ou asiatique, ou............. bref.

Connaissez-vous Brecht Evens, l'auteur belge des « noceurs » et des « amateurs » ? Pour celles et ceux qui douteraient encore de l'importance de la dimension esthétique et artistique dans la bande dessinée, feuilletez au moins quelques pages de ses œuvres. L'auteur a reçu « le prix de l'audace » à Angoulême en 2011, ce n'est pas pour rien !

Saviez-vous que la bd reportage a explosé dans la 1ère décennie des années 2000 ? Connaissez-vous Etienne Davodeau, Emmanuel Guibert, Guy Delisle pour ne parler que des auteurs francophones ? J'ai écrit un petit billet à propos du plus célèbre de ces bd reporters, qui a révolutionné le genre : j'ai nommé Joe Sacco. Découvrez l'œuvre de l'un de ces auteurs pour vous rendre compte à quel point la bd peut constituer un nouveau journalisme de terrain, un autre journalisme, proche des gens, avec un vrai point de vue. Ce n'est pas un hasard si de très bonnes revues telles que XXI font appel à ces auteurs.



Pour en finir avec la « légitimité » du genre bande dessinée, j'aurais pu vous parler de celles qui adaptent les classiques de la littérature. Mais la profusion des titres est telle que je vais me contenter lâchement de vous renvoyer vers ce dossier. Ah si, j'oubliais, une bd sur Nietzsche, vous y croyiez, vous ?

Et, pour finir, je ne peux m'empêcher d'évoquer le manga. Aah, le manga. On dit encore de lui toutes les bêtises qu'on a pu dire du rock, du rap, des bandes dessinées, de la science fiction, etc. Je vous conseille la lecture du coup de cœur de ma collègue, « Thermae romae », qui parle de... thermes romains !

Sachez qu'il existe également des mangakas (dessinateurs de mangas) qui plaisent à ceux qui n'aiment pas les mangas (si si) : j'ai nommé Taniguchi (histoires réalistes, dessin magnifique, tendresse, tout ça tout ça) ou Tezuka (le pape du manga). J'ajouterai un coup de cœur très récent : « Billy Bat », du génial Naoki Urasawa. C'est un polar qui mêle des dizaines d'intrigues de manière virtuose, le tout sur un rythme effréné : un vrai bonheur de lecture, en somme.


Voilà, vous n'avez plus qu'à y mettre un peu de bonne volonté et, qui sait ?, peut être renouerez-vous le dialogue avec votre ado ? Peut être discuterez-vous bd avec des bibliothécaires super sympas ? Peut-être dessinerez-vous vous-même des mangas et vous re-marierez-vous avec un japonais qui n'aime pas les mangas mais qui mange des pastèques ? (prononcez cette dernière phrase à voix haute pour obtenir un effet optimal).

J'ai pas bien entendu : merci qui?  "Merci toontoon"


Olivier