paul

Paul à la maison, Michel Rabagliati

« Paul à la maison » est le 9e tome de la série. Cette fois-ci, l’action de déroule en 2012, Paul est auteur de bande dessinée à temps plein et lance un nouvel ouvrage au Salon du livre de Montréal. Entre-temps, sa fille part travailler en Angleterre, Lucie n’habite plus avec lui et sa mère ne va pas bien… 

Paul à la maison traite du deuil, sous de multiples formes. Un album émouvant.

paul à la maison

Peu importe que l’on ait lu ou non les 8 tomes précédents de la série québécoise « Paul » : chacun peut se savourer indépendamment des autres. Celui-ci est sans aucun doute le plus touchant de tous. Paul arrive à la cinquantaine, a vécu un mariage, la naissance de sa fille, puis une séparation. Il se prépare à accompagner sa maman vers sa fin de vie. Le passé, le présent et l’avenir se mêlent dans des cases parfaitement calibrées, en noir et blanc. Y sont abordés de nombreux sujets qui nous touchent tou.te.s de près ou de loin, et c’est un bel effet miroir, quel que soit notre âge d’ailleurs. Enfin, mention spéciale pour tous les petits détails de la vie Montréalaise en arrière-plan, qui vous permettront de voyager depuis votre sofa…

Audrey

Les entrailles de New York

Les entrailles de New-York, Julia Wertz

Ceci n'est pas un livre d'histoire. Ce n'est pas non plus un guide sur New York. Vous n'y trouverez nulle part d'informations sur ses premiers habitants, ni de dessins d'Ellis Island ou de l'Empire State Building. Certes la statue de la Liberté y fait une brève apparition, mais c'est juste pour illustrer une histoire sur les déchets. Non, il s'agit plutôt d'un recueil d'histoires uniques et souvent oubliées sur le passé de New York, accompagnées de dessins des différents quartiers, tels qu'ils furent autrefois et tels qu'ils sont aujourd'hui. Si vous vous attendiez à un guide des restaurants et des monuments de la ville, c'est franchement pas de bol. Par contre, si nous en avez marre de ce genre de bouquins et que vous avez envie d'une approche un peu moins conventionnelle de cette ville, eh bien, vous tenez ce qu'il vous faut !

les entrailles 2

Vous aimez New-York ? Lisez cette BD.

Vous n’aimez pas New-York ? Lisez cette BD.

New… Quoi ? Lisez cette BD.

Vous l’aurez compris, j’ai eu un immense coup de cœur !

Julia Wertz, en plus d’être une dessinatrice de talent, est une excellente narratrice / historienne / exploratrice. Loin des clichés sur la ville de New-York, elle nous embarque dans un récit à la fois personnel, social et historique de la mégalopole. Vous y apprendrez comment le courrier a été expédié dans des réseau souterrains à air comprimé, pourquoi les flippers ont été prohibés, ou bien quelles devantures cachent aujourd’hui encore des bars clandestins… Je ne vais pas vous mentir : ce livre est un pavé, et peut paraître très dense pour une BD. Mais les dessins sont magnifiques, les anecdotes croustillantes, l’humour très présent, et vous passerez assurément un bon moment à vous extasier devant certains détails graphiques.

Bonus : vous aurez l’air super-cultivé lors de votre prochain apéro dînatoire !

Audrey

9782818048689 1 75

Il est des hommes qui se perdront toujours, Rebecca Lighieri

L'espérance de vie de l'amour, c'est huit ans. Pour la haine, comptez plutôt vingt. La seule chose qui dure toujours, c'est l'enfance, quand elle s'est mal passée.

On retrouve dans ce roman les thématiques chères à Rebecca Lighieri (aka Emmanuelle Bayamack-Tam) : l’enfance malmenée, les relations familiales toxiques et maltraitantes, les faiblesses physiques et mentales, la pauvreté, les violences de toute sorte… mais aussi la force de la communauté, la débrouille, la soif de liberté, la résilience.

Dans un quartier de Marseille, des années 80 aux années 2000, on suit la famille –dysfonctionnelle- de Karel : toxicomanie, père violent, bête et cruel, mère anesthésiée et complice. La fratrie composée d’Hendricka, de Mohand et de Karel essaie de pousser tant bien que mal, fuyant la maison dès que possible et se trouvant une famille d’adoption du côté des gitans sédentarisés qui leur offrent l’amour et le goût de vivre, inexistants chez eux.

Il ne s’agit pas ici d’un petit roman léger à déguster sur la plage, certes. En revanche, c’est une magnifique plongée à la fois musicale et sociale dans le Marseille de la fin du XXème siècle. Les personnages sont attachants pour certains, et l’intrigue sert de fil rouge à une histoire qui aurait pu sembler tristement banale, mais qui s’avère moins manichéenne qu’attendu.

Audrey

ame de lempereur1

Shai est forgeuse ; elle est capable de modifier le passé d'un objet et donc son présent. Emprisonnée pour avoir tenté de voler le spectre de la lune, elle doit forger une nouvelle âme pour l'empereur, laissé inconscient après une tentative d'assassinat, en échange de sa vie et de sa liberté. Elle a 100 jours pour y parvenir et son seul allié est le conseiller de l'empereur, Gaotona.

Un livre court mais parfaitement ciselé.
Faussaire et experte en magie : c'est une héroïne qui ne brille pas par son sens moral ! Contrainte à l'impossible tâche de re-sculpter l'âme de l'empereur dans un temps dramatiquement court, elle fait pourtant preuve d'une honnêteté qui frôle l'humanité. A sa manière...
Quelle est la différence entre création et arnaque ? Qu'est-ce qu'une personne ? Ce livre pose très subtilement ces questions embarrassantes au cours d'une intrigue serrée et haletante. En trame de fond, l'invention d'une forme particulièrement originale de magie.

Bérénice

EMPREINTE

L'Empreinte, Alexandria Marzano-Lesnevich

Etudiante en droit à Harvard, Alexandria Marzano-Lesnevich est une farouche opposante à la peine de mort. Jusqu'au jour où son chemin croise celui d'un tueur emprisonné en Louisiane, Rick Langley, dont la confession l'épouvante et ébranle toutes ses convictions. Pour elle, cela ne fait aucun doute : cet homme doit être exécuté. Bouleversée par cette réaction viscérale, Alexandria ne va pas tarder à prendre conscience de son origine en découvrant un lien tout à fait inattendu entre son passé, un secret de famille et cette terrible affaire qui réveille en elle des sentiments enfouis. Elle n'aura alors cesse d'enquêter inlassablement sur les raisons profondes qui ont conduit Langley à commettre ce crime épouvantable. Dans la lignée de séries documentaires comme Making a Murderer, ce récit au croisement du thriller, de l'autobiographie et du journalisme d'investigation, montre clairement combien la loi est quelque chose d'éminemment subjectif, la vérité étant toujours plus complexe et dérangeante que ce que l'on imagine.

Difficile de mettre des mots sur toutes les émotions ressenties durant la lecture de ce roman qui n’en est pas un : effroi, horreur, colère… Mais aussi compassion, pitié, et besoin de trouver du sens. Les thématiques abordées sont difficiles, cependant l’auteure nous décrit son cheminement ainsi que les divers évènements avec une telle fluidité, une telle sincérité aussi, qu’il est presqu’impossible de reposer ce livre avant de l’avoir terminé. Il s’agit d’une plongée dans les méandres d’une affaire criminelle, la réalité de plusieurs histoires familiales, mises en parallèle avec le propre passé d’Alexandria Marzano-Lesnevich.

Un récit complet et complexe, à ne pas mettre entre toutes les mains, et qui ne laissera aucun.e lecteur.trice indemne.

A.

Il est juste que les forts soient frappes

Il est juste que les forts soient frappés de Thibault Bérard

Lorsque Sarah rencontre Théo, c'est un choc amoureux. Elle, l'écorchée vive, la punkette qui ne s'autorisait ni le romantisme ni la légèreté, se plaisant à prédire que la Faucheuse la rappellerait avant ses 40 ans, va se laisser convaincre de son droit au bonheur par ce fou de Capra et de Fellini. Dans le tintamarre joyeux de leur jeunesse, de leurs amis et de leurs passions naît Simon. Puis, Sarah tombe enceinte d'une petite fille. Mais très vite, comme si leur bonheur avait provoqué la colère de l'univers, à l'euphorie de cette grossesse se substituent la peur et l'incertitude tandis que les médecins détectent à Sarah un cancer qui progresse à une vitesse alarmante. Chaque minute compte pour la sauver. Le couple se lance alors à corps perdu dans un long combat, refusant de sombrer dans le désespoir. Un récit d'une légèreté et d'une grâce bouleversantes, entre rire et larmes, dont on ressort empreint de gratitude devant la puissance redoutable du bonheur.

Aucun suspense : oui, elle meurt, et vous saurez presque tout dans les premières pages. Aucune originalité : la vie regorge de ce genre de drames injustes. Rien de particulier dans les personnages non plus : ils sont comme vous et moi, et ils préfèreraient une vie heureuse. Pourquoi ce livre, alors ? parce que je vous défie de ne pas pleurer à belles larmes et de plus en plus à mesure que vous avancerez vers la fin. Et parce que je vous défie aussi d'en ressortir désespérés. C'est cela le charme. Relisez bien le titre, une fois fini votre dernier mouchoir. Tout y est dit aussi...

Bérénice

nexus

La trilogie Nexus de Ramez Naam

En l'an 2035, Nexus est une nouvelle nanomolécule capable de relier les cerveaux entre eux. Kade, un jeune étudiant biologiste voit dans cette drogue de nouvelles possibilités de communication et un immense progrès pour la société. Il va se retrouver dans un monde où vont se mêler scientifiques chinois, moines bouddhistes et agents de la CIA et s'apercevoir que les enjeux sont conséquents...

De l'action (beaucoup), des sentiments, de l'introspection, une galerie de personnages attachants... servant un imaginaire proche. Aprés avoir émergé des 500 pages Nexus, vous n'aurez qu'une hâte: replonger immédiatement dans les 1500 pages de la suite Apex et Crush !

La suite de Nexus, dans la meme veine, vous invite plus profondément encore à réfléchir sur le transhumanisme et le posthumanisme.

Sonné, désarçonné... mais heureux d'avoir traversé les 2000 pages de cette incroyable trilogie dont la réalité est presque palpable. Gardons foi en l'humanité !

Philippe

le bihan

Un bonheur que je ne souhaite à personne / Samuel Le Bihan – Flammarion (2018)

Autisme : un mot derrière lequel on met bien des questions, des préjugés, des peurs, un mot opaque et qui effraie.

Autisme : un mot qui recouvre la réalité de nombreuses familles avec ses difficultés, son incompréhension souvent et sa souffrance parfois.

Si beaucoup de documentaires et de témoignages abordent ce thème, il existe peu de fictions, sans doute un exercice risqué qui pourrait vite tomber dans le pathos ou la complaisance.

Ce n’est pas le cas de ce premier roman de Samuel Le Bihan – lui-même papa d’une enfant autiste - où il dédramatise ce sujet pourtant grave, avec une bonne dose d’humour et des personnages décalés, charmants.

A travers des situations cocasses ou dramatiques, le lecteur suit Laura, qui a mis sa carrière et sa vie de femme entre parenthèses pour se consacrer à César, l’un de ses fils atteint d’autisme. Elle affronte l’indifférence, la curiosité malsaine voire l’intolérance avec une volonté pleine d’amour, d’énergie et avec une capacité admirable à rebondir.

C’est émouvant, c’est drôle et on se laisse embarquer avec bonheur dans cette galère quotidienne pleine de grâce.

Une belle préface de Jean-Christophe Rufin permet également un accès intéressant à ce roman.

Véronique